
En clôture de la journée de gala au profit de Santé Arménie pour son action en faveur des enfants victimes de post trauma par suite des guerres en terres d’Arménie, L’Action Musicale Internationale proposait un extraordinaire spectacle auquel ont participé avec grande générosité une cinquantaine d’artistes.
Parmi eux, le pianiste Ingmar Lazar a offert un programme en soliste d’abord puis en duo avec le violoniste Jean Samuel BEZ.
Ingmar Lazar
Ravel et ses “oiseaux tristes”
Ingmar Lazar a fait chanter et voleter les « oiseaux tristes » de Ravel comme si ces derniers se réveillaient dans un champ de ruines, n’osant ni voleter ni chanter, comme s’ils n’osaient comprendre où ils se trouvaient.
Des cris et des plaintes commencèrent à jaillir dans une sorte d’affolement qui, dès lors qu’il fut apaisé, sembla laisser la place à une sorte d’incrédulité.
Compte tenu du contexte de ce concert, on ne pouvait s’empêcher de songer à cet autre oiseau, tellement symbolique de l’Arménie, « la grue » qui, elle aussi à tant de fois survolé des champs où le désastre semble avoir été semé.

Beethoven et ses Adieux
« L’Absence et le Retour », les deuxième et troisième mouvements des « Adieux », sonate de Beethoven succédaient comme une évidence aux oiseaux de Ravel !
Dans L’Absence Ingmar Lazar fait surgir et s’alterner tous les sentiments que l’on peut rencontrer quand l’absence est empreinte de tristesse, d’incertitude et de colère. Mais le Retour fut comme une explosion de joie que l’on fait en chantant et en dansant lors d’une grande fête tout le monde se retrouve en jubilant !
Vraiment, Ingmar Lazar a fait preuve de sensibilité mais aussi d’une virtuosité qui ne masquait pas la profondeur de son jeu, dans ce programme qui a été choisi très en amont du concert et dont on avait le sentiment qu’il était construit comme présageant de ce qui arriva 2 jours après l’Artsakh.

Ingmar Lazar et Jean-Samuel Bez
Dans sa 2e partie de programme, Ingmar Lazar a invité le violoniste Jean Samuel Bez, jeune virtuose qui sillonne le monde en quasi-permanence pour jouer dans tous les styles et répertoires. Et c’est ce dernier qui a proposé a Ingmar Lazar d’inclure la Fantaisie Artsakh d’Eugénie Alécian dans le programme de cette soirée.
“A la fois pétillante et dramatique, commandée à la compositrice franco-arménienne Eugénie Alécian”, c’est une œuvre qui commence dans une sorte d’excitation joyeuse et donc succédait de manière parfaitement cohérente au Retour de Beethoven.
La Fantaisie Artsakh a été écrite en 2020, année où la république d’Azerbaïdjan a attaqué le peuple arménien sur sa terre ancestrale et en affirmant qu’il l’en chasserait.
Jean-Samuel Bez, dédicataire de l’œuvre en a fait siennes toutes les émotions de cette partition et Ingmar Lazar les a bien comprises et partagées avec maîtrise et conviction !
Lily Boulanger, Nocturne
Le duo a proposé un bis, lui aussi très en adéquation avec ce programme puisqu’il s’agissait d’un Nocturne de Lili Boulanger, compositrice française dont la vie fut très courte (décédée à 24 ans). Elle avait 18 ans quand elle écrivit cette œuvre incroyablement sereine et apaisante.

Les 2 musiciens ont vraiment fait honneur aux compositeurs qu’ils interprétaient ainsi qu’au thème de cette journée de Gala. Le public l’a bien compris et leur a fait une ovation.
Découvrir et écouter Ingmar Lazar qui vient d’enregistrer l’œuvre pour piano de César Franck.
Prochain concert d’Ingmar Lazar : mercredi 18 octobre à 20 heures, salle Cortot, Paris
Découvrir et écouter Jean Samuel Bez qui va créer avec le pianiste Jean-Luc Therrien le triptyque d’Eugénie Alecian :
Colora me, Noir et Blanc et la Fantaisie Artsakh. À partir du 17 septembre et jusqu’à la mi-novembre 2023, au Canada puis en tournée européenne dès la fin mars et jusqu’au début mai 2024